Belgrade a vraiment été une belle surprise. Cette ville restera définitivement un point central de mon voyage. Elle constituera également une sorte de charnière; elle m'a donné la sensation d'arriver sur le palier Oriental du continent Européen.
A mon départ pour le sud de la Serbie je me suis senti légèrement mélancolique. Milena, pour me souhaiter une bonne route, avait sorti une bouteille de Rakija dont nous avons bu plusieurs verres; la chaleur de l'alcool ne contrebalançait pas totalement le vague ã l'âme que je ressentais alors que le bus qui m'emmenait ã Niš m'éloignait chaque seconde un peu plus de la capitale Serbe.
Mais l'excitation inhérente ã chaque départ, le frisson qu'une destination inconnue vous réserve; tout cela procure une ivresse supérieure aux vapeurs de n'importe quelle liqueur : elle permet en effet d'effacer la tristesse du départ et de la remplacer par la joie de la route. Qui sait ce qui se trouve au bout du chemin, et pour être honnête, est-ce important ? Quand le vent frais s'engouffrant par la fenêtre vient fouetter mon visage, tout chargé de parfums et de désirs encore inconnus, je me sens plus vivant que jamais, et cette sensation enivrante que le voyage me permet d'atteindre me rappelle pourquoi je suis parti et ã quel point il est beau de continuer.
Bon faut se rendre ã l'évidence : après Belgrade, Niš est... moche. A mon arrivée il pleut et il fait très froid. Ce qui égaye un peu mon arrivée c'est qu'une prof de Français m'a contacté et m'a proposé de m'héberger.
Maria est venue me chercher ã la gare. Son français est impeccable, et c'est un plaisir de délaisser l'anglais pendant quelques jours...
Je ne vais pas vraiment m'attarder sur la ville de Niš; j'y ai passé de très bons moments mais l'endroit en lui même n'a pas grand chose d'exceptionnel...
Il existe cependant ã Niš un bâtiment qui attirera l'attention du voyageur...
Lamartine lui-même, alors qu'il voyage ã travers la Serbie, découvre par hasard l'ignoble architecture de cette tour...
Une nuit, alors qu'il arrive sur les plaines aux abords de la ville de Niš, il aperçoit de loin une tour blanche aux reflets brillants; il pense alors que celle-ci est probablement faite de marbre. İl décide de prendre du repos tout contre cette tour mystérieuse et s'assoit donc dos ã sa façade. C'est en levant les yeux que glacé d'effroi il comprend que les reflets brillants ne sont pas dus ã de la pierre, mais... aux crânes humains qui constituent en réalité les différents étages de la tour...
Lamartine écrit que le vent soufflant ã travers les orbites produisait un son triste et plaintif, comme un dernier gémissement prisonnier du temps...
Ćele Kula, littéralement "Tour des crânes", a été bâtie en 1809, après qu'une révolte Serbe contre l'envahisseur Ottoman se soit soldée par une explosion volontairement provoquée par l'un des commandants des forces Serbes rebelles. L'explosion emporta les derniers survivants Serbes et un grands nombre de soldats Ottomans. Fou de rage, le sultan Mahmud II ordonna qu'on décapite les corps des soldats Serbes, et afin d'épouvanter la population et de dissuader quiconque voulant s'interposer ã la puissance Ottomane, de construire une tour et d'y incruster les crânes, préalablement écorchés...
La tour est aujourd'hui au milieu d'une chapelle (construite après le départ des Ottomans) de manière ã la protéger des intempéries, et afin de donner une sorte de sépulture aux derniers crânes subsistants. La plupart ont étés volés, soit pour être enterrés soit pour devenir d'étranges objets de collection...
Je précise que la photo n'est pas de moi, je n'ai pas osé sortir mon appareil. Le lieu, même s'il est un endroit touristique, reste fort lugubre... Il faut imaginer qu'il y a 5 ou 6 étages comme ça...
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